Positionnement forêt de Nature Midi Pyrénées

Association régionale de protection de la nature basée à Toulouse, Nature Midi Pyrénées a également une antenne à Bagnères de Bigorre (65). Elle agit pour la sauvegarde de la flore, de la faune et des milieux naturels. Elle siège à de nombreuses commissions aux côtés des autres usagers de la montagne.

Nous publions ici son positionnement sur le milieu forestier datant de 2012. 



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   Positionnement sur la forêt de Nature Midi Pyrénées :

La forêt est avant tout un milieu naturel, habitat de nombreuses espèces de plantes et d’animaux, qui couvrait à l’origine la quasi totalité du territoire régional. Au cours des derniers millénaires, l’homme a exploité souvent intensivement la forêt, de sorte qu’aujourd’hui, quasiment toutes les forêts portent la marque des exploitations passées. On fera toutefois bien le distingo entre ce que l’on peut réellement encore appeler des forêts, qui bien qu’exploitées continuent à offrir des fonctionnalités écologiques, et les plantations monospécifiques (sapin Douglas, eucalyptus, par exemple) qui s’apparentent davantage à des cultures.

 La forêt a de nombreuses fonctions dont les complémentarités doivent être respectées :

  • Ecologiques : habitat naturel des espèces, protection de la ressource en eau (qualitative et quantitative), rôle dans la régulation de la composition atmosphérique et du climat (polluants, cycle du carbone, cycle de l’eau).

  • Sociales : lieu de loisir, de découverte, de cueillette

  • Economiques : production de bois, pâturage, lutte contre les avalanches et éboulements, protection contre l’érosion ou les crues …

La protection des forêts ne doit pas être perçue comme une contrainte mais comme une valorisation du territoire. Des forêts riches, diversifiées, avec un caractère naturel affirmé doivent contribuer à la réputation et à l’attrait de ce territoire.

 

Pour une exploitation compatible avec la préservation de l’écosystème

Le bois étant une ressource aux multiples avantages écologiques (énergie, construction), l’exploitation de la forêt est une activité nécessaire à notre société. Cependant, cette activité ne peut s’envisager que si elle reste compatible avec le maintien des fonctionnalités écologiques de la forêt. Sans entrer dans le détail, des règles générales mais fondamentales doivent être respectées : diversité en essences et en classes d’âge, priorité aux essences locales, suppression des coupes à blanc, respect de rotations longues, préservation de micro habitats, maintien d’arbres matures et sénescents, maintien d’un volume de bois mort minimal au sol et sur pied, respect des sols, des milieux aquatiques et des zones humides. Les outils existants (comme l’IBP, Indice de Biodiversité Potentielle, ou autres diagnostics) doivent être divulgués plus largement et leur utilisation doit être encouragée auprès des propriétaires forestiers.

Ces préconisations seront plus ou moins fortes suivant les objectifs assignés à chaque massif et la volonté du gestionnaire.

A terme, tous les massifs forestiers de la région devraient bénéficier d’une certification environnementale (PEFC, FSC).

 

L’exploitation en tant qu’outil d’aménagement du territoire

L’exploitation de la forêt peut être un excellent outil d’aménagement du territoire à condition de valoriser ses produits au mieux et au plus près. L’exploitation doit s’orienter vers une production à plus forte valeur ajoutée comme le bois d’œuvre, avec valorisation des gros et très gros bois qui rallonge les cycles sylvicoles. La recherche d’une plus value locale (transformation) en augmentant les marges économiques, permet d’éviter un gaspillage de la ressource et une gestion plus soutenable.

La production de bois énergie doit rester destinée à une utilisation locale pour ne pas annihiler ses effets positifs sur la limitation des émissions de gaz à effet de serre, mais aussi ne pas devenir le prétexte à des plantations monospécifiques. L’utilisation du bois d’œuvre concourt par ailleurs au stockage du carbone.

 

La fréquentation des forêts

Hors des espaces sensibles, la fréquentation pédestre n’a que des impacts limités sur l’écosystème forestier tant qu’elle reste raisonnable et maîtrisée. Pour cela la pénétration des massifs ne doit pas être facilité par un trop grand réseau de sentiers ou de pistes, car chaque forêt doit conserver des zones de quiétude pour la faune. Dans chaque forêt fréquentée par le public, des actions de sensibilisation doivent être menées pour éviter tout impact sur la flore (cueillette abusive) ou la faune (dérangement).

La survie de certaines espèces particulièrement sensibles aux dérangements (Ours brun, Grand tétras, rapaces rares…) requiert une gestion des forêts adaptée à l’écologie de ces espèces, ainsi que des limitations d’accès efficaces et respectées.

 

Les pistes forestières

L’ouverture d’une piste forestière ne se justifie généralement que par l’exploitation sylvicole. Ces pistes doivent être interdites à toute circulation motorisée sauf exception (exploitation agricole ou pastorale, lutte contre les incendies…) et, dans les sites les plus sensibles, condamnées après exploitation.

 

    Les forêts anciennes

Référentiel d’un état de nature non ou peu perturbé par les activités humaines, elles doivent être identifiées et caractérisées. La mise en repos de zones de manière entière ou partielle doit être encouragée, tout comme les dispositifs d’aide liés à la reconnaissance de l’utilité des forêts anciennes. L’exploitation, lorsqu’elle a lieu, doit répondre à un cahier des charges permettant de préserver le caractère de naturalité que l’on ne retrouve quasiment plus que dans ces milieux. D’autant plus que cette naturalité et la richesse d’une forêt dépendent entre autres de la continuité de l’état boisé et de la fonctionnalité écologique dans le temps, et que la rupture de ces paramètres est donc irréversible.

 

    La continuité forestière spatiale

Elément fondamental de la préservation de la biodiversité sur le long terme, la connectivité des milieux naturels doit être préservée et souvent restaurée car la continuité de l’état boisé est l’un des facteurs clé de la diversité taxonomique et génétique. La préservation de la faune et de la flore forestière passe par la mise en place, au sein de la Trame Verte et Bleue, d’un réseau forestier fonctionnel. Par ce terme, on entend des forêts comprenant les éléments écologiques fondamentaux tels que le bois mort en quantité suffisante, une diversité des essences, tant ligneuses qu’au niveau du sous bois (strates herbacées et buissonnantes), la présence de micro habitats ainsi que des zones humides forestières. Dans notre région, notamment en plaine, il sera nécessaire de revoir la gestion d’une bonne partie des forêts pour conserver ou retrouver de tels milieux.

 

    Les mesures de protection

Les mesures de protection doivent répondre à une vision globale. On doit chercher à préserver l’ensemble de la biodiversité par le maintien et la restauration de la fonctionnalité des écosystèmes. Cela passe par les mesures de gestion déjà évoquées dans les forêts exploitées, mais aussi par des mesures de protection fortes sur les forêts les plus riches. Certaines forêts constituent le dernier refuge pour des espèces menacées (Ours brun, Grand tétras, Pic à dos blanc, Taupin violacé, Pique-prune…) et doivent à ce titre faire l’objet de mesures de protection adaptées. Les outils existent mais restent sous employés dans la région : Réserves nationales et régionales, Arrêtés préfectoraux de protection de biotope, Réserves biologiques (intégrales ou dirigées).

 

    Les forêts en libre évolution

Il est utile de laisser évoluer librement certaines forêts ou parcelles, y compris auprès des zones urbaines. Ces espaces retrouvant leur naturalité sont importants pour l’aspect naturaliste, car en se diversifiant elles redeviennent un lieu d’accueil privilégié pour la faune et la flore. L’observation scientifique de ces zones est fondamentale car elle sert de référence au milieu d’une nature largement anthropisée. Leur rôle pédagogique est important, car il permet de faire comprendre que la nature peut très bien se développer seule, comme elle l’a fait jusqu’à ces derniers millénaires. L’homme sera aussi jugé dans sa capacité à respecter la nature sauvage dans son ensemble.

Car comme le dit Robert Hainard : «Le but vers lequel tendre, c’est une civilisation où la technologie servira à épargner la nature et non à la détruire ; une civilisation qui se mesurera à la quantité et à la qualité de nature sauvage qu’elle laissera subsister. …/… »
 
 

 

Ce positionnement a été rédigé par des membres de Nature Midi Pyrénées.
 
 

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